Caen en chantier (1933)
Posté : 18 juil. 2017, 18:04
intéressante visite de Caen fin 1933, à la découverte des travaux réalisés cette année-là
Le Moniteur du Calvados, numéro du 12 décembre 1933
http://normannia.info/ark%3A/86186/86c8 ... 0&s=0&cv=1
CAEN MODERNE
L'édilité Caennaise a procédé, samedi, à une intéressante visite des travaux municipaux
Samedi à 13 h. 30, André Detolle, maire de Caen; MM. Asseline, Cautru, Féret au Longbois et Yves Guillou, adjoints, entourés de nombreux conseillers municipaux qu'accompagnaient M. Pierre Marie, secrétaire-général adjoint de la mairie, remplaçant M. Maurice-Charles Renard, souffrant; MM. Jacquemard, ingénieur, directeur des services techniques et M. Le Boulanger, architecte, conducteur des travaux d'architectures de la Ville de Caen, ainsi que les représentants de la presse, prenaient place dans un vaste autocar afin de visiter les nombreux travaux exécutés sur l'initiative de la Municipalité Caennaise.
Nous jetons un coup d'œil sur la rue Paul-Doumer. Cette voie a été livrée à la circulation au début de cette année, Elle a dix mètres d'ouverture. La chaussée est en bitume par pénétration, les trottoirs sont en asphalte. Le passage a été effectué en remblai sur le grand Odon, des tronçons d’égouts ayant été posés à la traversée de la rue.
On sait combien le percement de cette voie est apprécié par tout le Haut quartier Saint-Martin, notamment, mis ainsi en communication directe avec le centre de la cité.
Voici la rue Georges-Lebret. Livrée à la circulation en 1932, elle a 16 mètres d'ouverture. La chaussée est en tarmacadam, les bordures en granit et les trottoirs en asphalte. Topographiquement, elle prolonge pour ainsi dire la rue Paul-Doumer, et forme un trait-d'union direct entre les quartiers de Vaucelles et de Saint-Martin.
Nous voici à l'école des garçons, rue Daniel-Huet. Cette école a été agrandie de deux classes spacieuses, bien aérées et munies de vestiaire avec lavabos. À la suite de ces classes, un préau fermé a été édifié, qui peut être utilisé comme salle de conférences ou de cinéma.
En raison de l'importance de cette école, elle a été dotée d'un bâtiment de quatre pièces à usage de conciergerie.
La cour de récréation étant insuffisante, une nouvelle cour a été créée, où sont installés des w.-c. modernes, munis de chasses d'eau automatiques.
Là, comme dans toutes les écoles de la ville, qui ont subi des transformations et que l'on a récemment aménagées, le chauffage central des bâtiments anciens et nouveaux est assuré par une installation au mazout, fonctionnant automatiquement et donnant une température de 14 à 16°.
Cette installation permet la suppression d'un coûteux personnel de chauffe et des manutentions anti-hygiéniques de charbon et de coke.
Notons que le contrôle du liquide dans les réservoirs à mazout est effectué très simplement par l'intermédiaire d'appareils spéciaux, fonctionnant par dépression d'air et indiquant automatiquement sur un cadran la quantité de « gaz-oil » contenue dans la ci-terne. En outre, le réglage des températures diurne et nocturne se fait dans toutes ces installations par l'intermédiaire de «thermostats », placés au gré des intéressés, à un emplacement quelconque des locaux chauffés.
En certains cas, l'étendue des surfaces couvertes a obligé à réaliser le chauffage à l'aide de deux ou trois chaufferies disposées judicieusement.
L’École des filles, place Gambetta, a été agrandie au premier étage, de deux classes prises dans des combles importants et inutilisés. Le temps nous manque pour en effectuer la visite. Le chauffage central au mazout y existe.
Nous stationnons un court instant devant le Square de l'Abreuvoir, à l'entrée de l'ancien Cours Circulaire, dénommé Boulevard Aristide-Briand.
Qui reconnaîtrait, en ce square si coquet, le marécage insalubre sur la rive duquel les jardins d'agrément des maisons de la rue Grusse, s'étalaient comme à regret, alors que quelque lad dépenaillé, gesticulant sur une passerelle délabrée, obligeait un malheureux cheval à s'ébattre en l'onde noirâtre et pestilentielle.
Aujourd'hui, les rives de l'Odon sont vraiment enchanteresses, grâce aux élégantes frondaisons, aux massifs harmonieusement dessinés, qui forment une sorte de coquet proscenium au décor superbe, qu'on a su planter à l'entrée des Tribunes, avec le Grand Cours pour toile de fond. Décor splendide, cadre unique que ne se lassent pas d'admirer les amateurs de turf.
Nous voici rue du Carel.
Cette voie a été livrée à la circulation en 1932. Elle est bornée à droite par l'antique rempart de l'Abbaye de Saint-Étienne.
A ce sujet, nos lecteurs seront peut-être heureux qu'on leur rappelle que « les mêmes motifs qui, après les désastres de l'invasion anglaise de 1346, avaient déterminé à fortifier l'abbaye de Sainte Trinité, firent adopter une résolution semblable, à l'égard de celle de Saint-Étienne. Le roi Jean, qui y séjournait en 1354, donna lettres-patentes à cet effet, sous la date du 4 décembre de cette même année, et le travail, en pleine activité en 1357, dut être probablement terminé peu après. »
« C'est en 1454, dans la lutte soutenue contre les Anglais, que fut démantelée une partie des fortifications de l'Abbaye aux Hommes » (1), dont nous contemplons aujourd'hui les derniers vestiges.
La rue du Carel mesure actuellement 10 mètres d'ouverture; ce n'est plus l'étroit passage ou poussiéreux ou fangeux que nous avons connu ! En effet, la chaussée est en tarmacadam, les caniveaux et les bordures sont en béton. Cette voie a été aménagée au-dessus de l'ancien lit de l'Odon et la rivière canalisée dans des tuyaux de ciment de 2 mètres de diamètre. (Promenade du Fort, le Grand Odon a été détourné de son lit et amené par une canalisation de 2 mètres à la rigole alimentaire, place Gambetta).
À l'extrémité de la rue du Carel, on a aménagé une sorte de vaste planitre, que complètent, place aux Granges, de larges trottoirs plantés d'arbres; ce coin de Caen, rendu salubre, a maintenant l'aspect élégant et gai.
Place du Lycée, on a procédé à l'aménagement du square érigé en arrière de l'obélisque élevé à la mémoire du duc de Berry. Ce square va être planté de rosiers.
Le temps ne permet pas de visiter les installations de chauffage central de l’École supérieure de garçons, rue de Bayeux, et de l’École primaire de garçons, rue Bicoquet.
En ce qui concerne cette dernière école, deux classes nouvelles ont été aménagées dans une ancienne salle de conférences.
Signalons, en passant, que l'installation du chauffage central au mazout faite à l’École supérieure de garçons, rue de Bayeux, est la plus importante de toutes celles effectuées dans les divers bâtiments de la Ville. Elle a coûté 300.000 francs. Trois chaufferies ont été disposées dans les sous-sols de l'établissement.
Nous mettons pied à terre à l’École des filles de La Maladrerie.
Après un rapide coup d'œil sur le magnifique panorama de Caen qui se déroule à notre vue, nous pénétrons dans cette école qui ne comprenait précédemment que trois classes de dimensions restreintes et d'éclairage naturel insuffisant.
Le bâtiment ancien ne contient plus que deux classes spacieuses au lieu de trois; on a agrandi les anciennes baies, on a créé des lavabos et des vestiaires et procédé au ravalement indispensable des façades, qui paraissent toutes neuves.
Perpendiculairement au bâtiment ancien, deux classes nouvelles ont été construites avec les mêmes aménagements que les précédentes; une nouvelle cour de récréation a été créée avec w.-c. modernes.
Nous nous intéressons, amusés, à l'installation de l’École Maternelle, avec ses petites chaises qui ont l'air de joujoux !
Enfin, s'harmonisant avec ce coquet ensemble, on a édifié un beau préau en béton armé.
L'ensemble des bâtiments forme maintenant un tout complet et le profane éprouverait de sérieuses difficultés à discerner l'ancienne construction de la nouvelle.
Là encore, le chauffage au mazout donne de très heureux résultats.
Les plans de cette école, ainsi que ceux de l'école maternelle de l'avenue Georges-Guynemer et de l’École de la rue de la Masse, sont dus à M. Enault, architecte municipal qui vient de prendre sa retraite et auquel nous sommes heureux d'adresser nos plus vives félicitations.
Nous voici transportés au Jardin des Plantes.
Puisque cette promenade est à la fois documentaire et instructive, qu'il nous soit permis de rappeler brièvement qu'aucun germe d'établissement de cette espèce n'existait à Caen, avant la fin du XVIIe siècle.
C'est à Callard de la Ducquerie que nous devons la première collection choisie de plantes.
Il y avait alors 559 espèces.
Marescot lui succédait en 1718, et c'est en 1738 que fut acquis le Jardin des Plantes actuel, qui comptait en 1739 : 3.479 espèces, et qui a subi divers agrandissements.
Il a prospéré après Marescot, sous ses successeurs Blot, Desmoueux, Devaux, Lamouroux, etc..
(Le tombeau de Desmoueux existe encore dans la partie haute du Jardin)(2).
Nos lecteurs, amateurs d'horticulture, constateront, comme nous, avec le plus vif plaisir, que la grande serre, dont on déplorait l'état de vétusté et qui abrite l'hiver des plantes de très grande valeur, a été complètement remise à neuf cette année, de même que la galerie de circulation.
Les années précédentes, deux petites serres avaient, elles aussi, subi d'importants travaux de réfection. Ce programme se poursuivra, sur les crédits d'entretien, les années à venir, jusqu'à remise en état complète de toutes les serres.
Rappelons que celles-ci, en dehors d'une riche collection d'orchidées, contiennent les plantes les plus rares, dont certaines exotiques et fort curieuses, attirent la visite de nombreux étrangers.
Une serre à multiplication en bois et maçonnerie est en voie d'achèvement et conçue de telle façon que la perspective de l'entrée du Jardin n'en soit pas modifiée. Cette serre permettra d'obtenir, dès les mois de mars et avril, les fleurs nécessaires à la décoration de nos squares et jardins.
Les anciennes et vétustés chaudières « à cloche », chauffant l'ensemble des serres, viennent d'être remplacées par des chaudières modernes ayant fait leurs preuves.
D'autre part, les locaux de l'Institut botanique, situés dans le bâtiment principal des grandes serres, viennent d'être restaurés et transformés, à la grande satisfaction du distingué directeur, M. le docteur Choux.
Nous nous dirigeons ensuite vers la rue de la Masse.
Entre l'avenue Georges-Clemenceau et la rue Basse, on a procédé à la réfection de la chaussée avec du bitume, par pénétration.
Nous visitons en détail l’École des garçons de la rue de la Masse prolongée, qui vient d'être ouverte à l'enseignement. Située sur un terrain vaste et bien aéré, elle comprend sept classes avec logement du directeur, bâtiment de conciergerie, cantine, réfectoire, préau et w.-c. modernes dans la cour.
Toutes les classes sont munies de lavabos et de vestiaires. Les escaliers et les dégagements sont très larges, afin de permettre une circulation facile
Cette école, comme les précédentes, a été dotée d'une installation de chauffage central au mazout.
La rue de la Masse prolongée va subir, dans un avenir prochain, une modification importante. Sa ligne droite sera continuée et la nouvelle voie s'ouvrir à quelques mètres de l'entrée de l'hôpital.
L'heure avançant, on décide de ne pas visiter l'installation du chauffage central au mazout de l’École de filles de la rue du Puits-Picard, appelée tout récemment encore « groupe scolaire ».
Nous nous rendons au Commissariat du 1er arrondissement, rue Saint-Malo (dénommé Commissariat de la Tour).
Aviez-vous visité l'ancien Commissariat, véritable taudis ? Aujourd'hui, une construction neuve, claire et spacieuse, le remplace.
Je ne sais si vous avez pénétré... « l'âme des violons », en la Tour Guillaume-le-Roi (Rappelons brièvement que cette tour, située sur la Petite Orne, un peu au-dessous du pont Saint-Pierre — dont une partie de l'arche de pierre était apparente il y a peu de jours encore, lors des travaux d’égouts de la place Saint-Pierre, alors qu'on découvrait une partie du mur d'enceinte que l'on a dû démolir complètement pour passer les tuyaux d'un diamètre imposant — tout près de la Porte Saint-Malo, avait pour objet de fermer, sur ce point, l'entrée de la Ville par la rivière. La Tour au Landais, qui lai faisait face, commandait l'autre rive). (3).
Mais revenons aux «violons ». Ceux-ci, situés autrefois en sous-sol dans « la Tour » étaient dans un état d'infection continuel, que nous nous refusons à décrire...
Aujourd'hui, les cellules sont au rez-de-chaussée, parfaitement saines et dissimulées à la vue du public. Le planton a son poste muni d'un guichet.
Au premier étage, se trouve le poste des agents, une salle d'archives, w.-c, et les bureaux du commissaire de police et du secrétariat. Tous les locaux sont munis du chauffage central au mazout.
L'installation des w.-c, tant des cellules que de l'étage, est reliée à l’égout collecteur par une fosse septique. Le nettoyage des appareils est assuré d'une façon intermittente par une chasse d'eau automatique.
Sur l'itinéraire prévu, nous lisons qu'un arrêt est indiqué à la Poissonnerie,
«Ce bâtiment remonte à 1832; ce fut un des premiers soins du nouveau Conseil municipal après la Révolution de 1830, de remplacer les anciens établissements, mal situés, mal orientés, mal aérés et d'un entretien difficile quant à la propreté, par un autre bâtiment qui ne donnât pas lieu aux mêmes reproches » (4). C'est celui que nous voyons encore aujourd'hui.
Nos édiles ont tenu à apporter de notables améliorations, que nous tenons à souligner deux tables de vente en béton armé, viennent d'être installées et ont permis de doubler le nombre des places de vente.
Un meilleur éclairage, en même temps qu'une protection plus efficace du public contre les courants d'air intenses dans cet établissement, ont été réalisés en remplaçant partiellement les persiennes des baies par des châssis en menuiserie, munis de vitres.
Nous avons omis, en raison du temps limité, de nous rendre place du Sépulcre, où l'on envisage la construction possible d'une école, pour remplacer celle de la rue du Vaugueux.
L'asile de nuit qui avait pris place en l'église collégiale du Saint-Sépulcre (supprimée par suite de la révolution de 1789), a été transféré dans le bâtiment des dockers, quai Vendeuvre, et abrite, en ces nuits glaciales, de nombreux sans-logis.
(A suivre).
G, Lt,
(1) Histoire de la Ville de Caen, par Fréd. Vaultier, Caen, Mancel, libraire, 1843, f° 64 et 65.
(2) Ibid., f° 342 et 343.
(3) Ibid., f° 199 et 200.
(4) Ibid., f° 216.
Le Moniteur du Calvados, numéro du 12 décembre 1933
http://normannia.info/ark%3A/86186/86c8 ... 0&s=0&cv=1
CAEN MODERNE
L'édilité Caennaise a procédé, samedi, à une intéressante visite des travaux municipaux
Samedi à 13 h. 30, André Detolle, maire de Caen; MM. Asseline, Cautru, Féret au Longbois et Yves Guillou, adjoints, entourés de nombreux conseillers municipaux qu'accompagnaient M. Pierre Marie, secrétaire-général adjoint de la mairie, remplaçant M. Maurice-Charles Renard, souffrant; MM. Jacquemard, ingénieur, directeur des services techniques et M. Le Boulanger, architecte, conducteur des travaux d'architectures de la Ville de Caen, ainsi que les représentants de la presse, prenaient place dans un vaste autocar afin de visiter les nombreux travaux exécutés sur l'initiative de la Municipalité Caennaise.
Nous jetons un coup d'œil sur la rue Paul-Doumer. Cette voie a été livrée à la circulation au début de cette année, Elle a dix mètres d'ouverture. La chaussée est en bitume par pénétration, les trottoirs sont en asphalte. Le passage a été effectué en remblai sur le grand Odon, des tronçons d’égouts ayant été posés à la traversée de la rue.
On sait combien le percement de cette voie est apprécié par tout le Haut quartier Saint-Martin, notamment, mis ainsi en communication directe avec le centre de la cité.
Voici la rue Georges-Lebret. Livrée à la circulation en 1932, elle a 16 mètres d'ouverture. La chaussée est en tarmacadam, les bordures en granit et les trottoirs en asphalte. Topographiquement, elle prolonge pour ainsi dire la rue Paul-Doumer, et forme un trait-d'union direct entre les quartiers de Vaucelles et de Saint-Martin.
Nous voici à l'école des garçons, rue Daniel-Huet. Cette école a été agrandie de deux classes spacieuses, bien aérées et munies de vestiaire avec lavabos. À la suite de ces classes, un préau fermé a été édifié, qui peut être utilisé comme salle de conférences ou de cinéma.
En raison de l'importance de cette école, elle a été dotée d'un bâtiment de quatre pièces à usage de conciergerie.
La cour de récréation étant insuffisante, une nouvelle cour a été créée, où sont installés des w.-c. modernes, munis de chasses d'eau automatiques.
Là, comme dans toutes les écoles de la ville, qui ont subi des transformations et que l'on a récemment aménagées, le chauffage central des bâtiments anciens et nouveaux est assuré par une installation au mazout, fonctionnant automatiquement et donnant une température de 14 à 16°.
Cette installation permet la suppression d'un coûteux personnel de chauffe et des manutentions anti-hygiéniques de charbon et de coke.
Notons que le contrôle du liquide dans les réservoirs à mazout est effectué très simplement par l'intermédiaire d'appareils spéciaux, fonctionnant par dépression d'air et indiquant automatiquement sur un cadran la quantité de « gaz-oil » contenue dans la ci-terne. En outre, le réglage des températures diurne et nocturne se fait dans toutes ces installations par l'intermédiaire de «thermostats », placés au gré des intéressés, à un emplacement quelconque des locaux chauffés.
En certains cas, l'étendue des surfaces couvertes a obligé à réaliser le chauffage à l'aide de deux ou trois chaufferies disposées judicieusement.
L’École des filles, place Gambetta, a été agrandie au premier étage, de deux classes prises dans des combles importants et inutilisés. Le temps nous manque pour en effectuer la visite. Le chauffage central au mazout y existe.
Nous stationnons un court instant devant le Square de l'Abreuvoir, à l'entrée de l'ancien Cours Circulaire, dénommé Boulevard Aristide-Briand.
Qui reconnaîtrait, en ce square si coquet, le marécage insalubre sur la rive duquel les jardins d'agrément des maisons de la rue Grusse, s'étalaient comme à regret, alors que quelque lad dépenaillé, gesticulant sur une passerelle délabrée, obligeait un malheureux cheval à s'ébattre en l'onde noirâtre et pestilentielle.
Aujourd'hui, les rives de l'Odon sont vraiment enchanteresses, grâce aux élégantes frondaisons, aux massifs harmonieusement dessinés, qui forment une sorte de coquet proscenium au décor superbe, qu'on a su planter à l'entrée des Tribunes, avec le Grand Cours pour toile de fond. Décor splendide, cadre unique que ne se lassent pas d'admirer les amateurs de turf.
Nous voici rue du Carel.
Cette voie a été livrée à la circulation en 1932. Elle est bornée à droite par l'antique rempart de l'Abbaye de Saint-Étienne.
A ce sujet, nos lecteurs seront peut-être heureux qu'on leur rappelle que « les mêmes motifs qui, après les désastres de l'invasion anglaise de 1346, avaient déterminé à fortifier l'abbaye de Sainte Trinité, firent adopter une résolution semblable, à l'égard de celle de Saint-Étienne. Le roi Jean, qui y séjournait en 1354, donna lettres-patentes à cet effet, sous la date du 4 décembre de cette même année, et le travail, en pleine activité en 1357, dut être probablement terminé peu après. »
« C'est en 1454, dans la lutte soutenue contre les Anglais, que fut démantelée une partie des fortifications de l'Abbaye aux Hommes » (1), dont nous contemplons aujourd'hui les derniers vestiges.
La rue du Carel mesure actuellement 10 mètres d'ouverture; ce n'est plus l'étroit passage ou poussiéreux ou fangeux que nous avons connu ! En effet, la chaussée est en tarmacadam, les caniveaux et les bordures sont en béton. Cette voie a été aménagée au-dessus de l'ancien lit de l'Odon et la rivière canalisée dans des tuyaux de ciment de 2 mètres de diamètre. (Promenade du Fort, le Grand Odon a été détourné de son lit et amené par une canalisation de 2 mètres à la rigole alimentaire, place Gambetta).
À l'extrémité de la rue du Carel, on a aménagé une sorte de vaste planitre, que complètent, place aux Granges, de larges trottoirs plantés d'arbres; ce coin de Caen, rendu salubre, a maintenant l'aspect élégant et gai.
Place du Lycée, on a procédé à l'aménagement du square érigé en arrière de l'obélisque élevé à la mémoire du duc de Berry. Ce square va être planté de rosiers.
Le temps ne permet pas de visiter les installations de chauffage central de l’École supérieure de garçons, rue de Bayeux, et de l’École primaire de garçons, rue Bicoquet.
En ce qui concerne cette dernière école, deux classes nouvelles ont été aménagées dans une ancienne salle de conférences.
Signalons, en passant, que l'installation du chauffage central au mazout faite à l’École supérieure de garçons, rue de Bayeux, est la plus importante de toutes celles effectuées dans les divers bâtiments de la Ville. Elle a coûté 300.000 francs. Trois chaufferies ont été disposées dans les sous-sols de l'établissement.
Nous mettons pied à terre à l’École des filles de La Maladrerie.
Après un rapide coup d'œil sur le magnifique panorama de Caen qui se déroule à notre vue, nous pénétrons dans cette école qui ne comprenait précédemment que trois classes de dimensions restreintes et d'éclairage naturel insuffisant.
Le bâtiment ancien ne contient plus que deux classes spacieuses au lieu de trois; on a agrandi les anciennes baies, on a créé des lavabos et des vestiaires et procédé au ravalement indispensable des façades, qui paraissent toutes neuves.
Perpendiculairement au bâtiment ancien, deux classes nouvelles ont été construites avec les mêmes aménagements que les précédentes; une nouvelle cour de récréation a été créée avec w.-c. modernes.
Nous nous intéressons, amusés, à l'installation de l’École Maternelle, avec ses petites chaises qui ont l'air de joujoux !
Enfin, s'harmonisant avec ce coquet ensemble, on a édifié un beau préau en béton armé.
L'ensemble des bâtiments forme maintenant un tout complet et le profane éprouverait de sérieuses difficultés à discerner l'ancienne construction de la nouvelle.
Là encore, le chauffage au mazout donne de très heureux résultats.
Les plans de cette école, ainsi que ceux de l'école maternelle de l'avenue Georges-Guynemer et de l’École de la rue de la Masse, sont dus à M. Enault, architecte municipal qui vient de prendre sa retraite et auquel nous sommes heureux d'adresser nos plus vives félicitations.
Nous voici transportés au Jardin des Plantes.
Puisque cette promenade est à la fois documentaire et instructive, qu'il nous soit permis de rappeler brièvement qu'aucun germe d'établissement de cette espèce n'existait à Caen, avant la fin du XVIIe siècle.
C'est à Callard de la Ducquerie que nous devons la première collection choisie de plantes.
Il y avait alors 559 espèces.
Marescot lui succédait en 1718, et c'est en 1738 que fut acquis le Jardin des Plantes actuel, qui comptait en 1739 : 3.479 espèces, et qui a subi divers agrandissements.
Il a prospéré après Marescot, sous ses successeurs Blot, Desmoueux, Devaux, Lamouroux, etc..
(Le tombeau de Desmoueux existe encore dans la partie haute du Jardin)(2).
Nos lecteurs, amateurs d'horticulture, constateront, comme nous, avec le plus vif plaisir, que la grande serre, dont on déplorait l'état de vétusté et qui abrite l'hiver des plantes de très grande valeur, a été complètement remise à neuf cette année, de même que la galerie de circulation.
Les années précédentes, deux petites serres avaient, elles aussi, subi d'importants travaux de réfection. Ce programme se poursuivra, sur les crédits d'entretien, les années à venir, jusqu'à remise en état complète de toutes les serres.
Rappelons que celles-ci, en dehors d'une riche collection d'orchidées, contiennent les plantes les plus rares, dont certaines exotiques et fort curieuses, attirent la visite de nombreux étrangers.
Une serre à multiplication en bois et maçonnerie est en voie d'achèvement et conçue de telle façon que la perspective de l'entrée du Jardin n'en soit pas modifiée. Cette serre permettra d'obtenir, dès les mois de mars et avril, les fleurs nécessaires à la décoration de nos squares et jardins.
Les anciennes et vétustés chaudières « à cloche », chauffant l'ensemble des serres, viennent d'être remplacées par des chaudières modernes ayant fait leurs preuves.
D'autre part, les locaux de l'Institut botanique, situés dans le bâtiment principal des grandes serres, viennent d'être restaurés et transformés, à la grande satisfaction du distingué directeur, M. le docteur Choux.
Nous nous dirigeons ensuite vers la rue de la Masse.
Entre l'avenue Georges-Clemenceau et la rue Basse, on a procédé à la réfection de la chaussée avec du bitume, par pénétration.
Nous visitons en détail l’École des garçons de la rue de la Masse prolongée, qui vient d'être ouverte à l'enseignement. Située sur un terrain vaste et bien aéré, elle comprend sept classes avec logement du directeur, bâtiment de conciergerie, cantine, réfectoire, préau et w.-c. modernes dans la cour.
Toutes les classes sont munies de lavabos et de vestiaires. Les escaliers et les dégagements sont très larges, afin de permettre une circulation facile
Cette école, comme les précédentes, a été dotée d'une installation de chauffage central au mazout.
La rue de la Masse prolongée va subir, dans un avenir prochain, une modification importante. Sa ligne droite sera continuée et la nouvelle voie s'ouvrir à quelques mètres de l'entrée de l'hôpital.
L'heure avançant, on décide de ne pas visiter l'installation du chauffage central au mazout de l’École de filles de la rue du Puits-Picard, appelée tout récemment encore « groupe scolaire ».
Nous nous rendons au Commissariat du 1er arrondissement, rue Saint-Malo (dénommé Commissariat de la Tour).
Aviez-vous visité l'ancien Commissariat, véritable taudis ? Aujourd'hui, une construction neuve, claire et spacieuse, le remplace.
Je ne sais si vous avez pénétré... « l'âme des violons », en la Tour Guillaume-le-Roi (Rappelons brièvement que cette tour, située sur la Petite Orne, un peu au-dessous du pont Saint-Pierre — dont une partie de l'arche de pierre était apparente il y a peu de jours encore, lors des travaux d’égouts de la place Saint-Pierre, alors qu'on découvrait une partie du mur d'enceinte que l'on a dû démolir complètement pour passer les tuyaux d'un diamètre imposant — tout près de la Porte Saint-Malo, avait pour objet de fermer, sur ce point, l'entrée de la Ville par la rivière. La Tour au Landais, qui lai faisait face, commandait l'autre rive). (3).
Mais revenons aux «violons ». Ceux-ci, situés autrefois en sous-sol dans « la Tour » étaient dans un état d'infection continuel, que nous nous refusons à décrire...
Aujourd'hui, les cellules sont au rez-de-chaussée, parfaitement saines et dissimulées à la vue du public. Le planton a son poste muni d'un guichet.
Au premier étage, se trouve le poste des agents, une salle d'archives, w.-c, et les bureaux du commissaire de police et du secrétariat. Tous les locaux sont munis du chauffage central au mazout.
L'installation des w.-c, tant des cellules que de l'étage, est reliée à l’égout collecteur par une fosse septique. Le nettoyage des appareils est assuré d'une façon intermittente par une chasse d'eau automatique.
Sur l'itinéraire prévu, nous lisons qu'un arrêt est indiqué à la Poissonnerie,
«Ce bâtiment remonte à 1832; ce fut un des premiers soins du nouveau Conseil municipal après la Révolution de 1830, de remplacer les anciens établissements, mal situés, mal orientés, mal aérés et d'un entretien difficile quant à la propreté, par un autre bâtiment qui ne donnât pas lieu aux mêmes reproches » (4). C'est celui que nous voyons encore aujourd'hui.
Nos édiles ont tenu à apporter de notables améliorations, que nous tenons à souligner deux tables de vente en béton armé, viennent d'être installées et ont permis de doubler le nombre des places de vente.
Un meilleur éclairage, en même temps qu'une protection plus efficace du public contre les courants d'air intenses dans cet établissement, ont été réalisés en remplaçant partiellement les persiennes des baies par des châssis en menuiserie, munis de vitres.
Nous avons omis, en raison du temps limité, de nous rendre place du Sépulcre, où l'on envisage la construction possible d'une école, pour remplacer celle de la rue du Vaugueux.
L'asile de nuit qui avait pris place en l'église collégiale du Saint-Sépulcre (supprimée par suite de la révolution de 1789), a été transféré dans le bâtiment des dockers, quai Vendeuvre, et abrite, en ces nuits glaciales, de nombreux sans-logis.
(A suivre).
G, Lt,
(1) Histoire de la Ville de Caen, par Fréd. Vaultier, Caen, Mancel, libraire, 1843, f° 64 et 65.
(2) Ibid., f° 342 et 343.
(3) Ibid., f° 199 et 200.
(4) Ibid., f° 216.