C'était Caen. De 1104 à 1936, l'incroyable histoire du canal
Photographie du canal de Caen à la mer datant du début du vingtième siècle.
Crédit photo collection Cadomus
C’était Caen ? Il y a 179 ans, le conseil municipal de Caen décidait de lier la ville à la mer, via un canal. Du fils de Guillaume le Conquérant à Napoléon, retour sur un projet qui a mis des siècles à se concrétiser.
Pour retrouver trace des premiers travaux portuaires dans la ville, il faut remonter au début du XIIe siècle. En 1104, face à l’augmentation du trafic, Robert Courte-Heuse, fils de Guillaume le Conquérant, ordonne la construction de quais dans Caen. Le bassin créé à l’époque existe toujours aujourd’hui, puisqu’il s’agit du bassin Saint-Pierre, toujours aussi essentiel à la ville en 2015.
Puis plus personne ne se préoccupe du port de Caen pendant plusieurs siècles. Les commerçants ont beau réclamer des travaux pour faciliter l’accès à la mer, rien ne change. La raison ? Une grande partie de la population redoute que ces travaux n’aggravent les inondations, déjà fréquentes et dévastatrices. Il faudra attendre le XVIe siècle pour qu’on s’intéresse à nouveau au port.
Sept siècles d’échecs
Les berges de l’Orne sont alors en très mauvais état et le cours d’eau s’envase tellement qu’il devient de plus en plus difficile pour les navires de commercer avec Caen. Des aménagements sont nécessaires. François d’O, lieutenant général de Basse-Normandie, le comprend et envoie un ingénieur sur place.
Cependant, les projets établis à l’époque sont vite oubliés et à nouveau repoussés. C’est Vauban qui, en 1679, ranime l’idée d’un réaménagement du port de Caen.
Son idée ? Redresser l’Orne pour faciliter la navigation entre Caen et la mer. Mais le projet, interrompu en 1683, à la suite de la mort de Colbert, devient vite un désastre. Même à marée haute, il n’est plus possible de faire passer les navires.
Durant le XVIIIe siècle, les plans se succèdent et l’issue est toujours la même : l’échec. Fautes architecturales, manque de moyens financiers, solutions temporaires de mauvaise qualité…L’Orne devient tellement impraticable que de nombreux vaisseaux coulent en la traversant. La Révolution, et la période de troubles qui la suit, empêchent de conclure les nouveaux plans lancés à la fin du XVIIIe siècle.
Mais en 1798, l’ingénieur Cachin propose un projet radicalement différent de tout ce qui a pu se faire par le passé. L’idée ? Construire un canal qui relierait Caen à la mer, en passant par Colleville-sur-Orne, aujourd’hui appelée Colleville-Montgomery.
Lescaille, un autre ingénieur, suggère de passer plutôt par Ouistreham. Mais une nouvelle modification advient en 1811, à la suite de la visite de Napoléon. Pattu, son ingénieur des Ponts et Chaussées, valide un nouveau projet… Lui aussi annulé, après la chute de l’Empire.
C’est finalement l’ingénieur Eustache qui aura le dernier mot. Malgré le coût élevé du projet, celui-ci est validé par l’administration : « Le canal maritime doit partir du milieu du canal Saint-Pierre, longer la rive gauche de l‘Orne et déboucher à la mer au travers des dunes de Oyestreham.» Le 12 août 1 836, le conseil municipal de Caen valide ce projet.
Cette rubrique est réalisée avec l’aide de Cadomus, cette association a entrepris de reconstituer le Caen d’avant-guerre en 3 D. Chaque samedi, nous portons un regard sur le passé et plus particulièrement sur la date anniversaire d’un événement, tiré de la semaine en cours.
Louis TANCA